« Voilà, tout cela pour vous dire que je vous aime et que je vous aimerai toujours. » La vidéo se coupa et Sixtine jeta alors un coup d’œil  à ses parents, installés dans le divan juste à ses côtés. Ils avaient les larmes aux yeux. Sa mère se tourna vers elle et la prit dans ses bras. « Oh ma chérie, si tu savais à quel point nous t’aimons … Ce cadeau est magnifique. » Pour Sixtine, cette vidéo ne pouvait pas vraiment être considérée comme un cadeau mais faute de mieux … Elle n’avait pas su acheter le cadeau qu’elle souhaitait à ses parents : un voyage sur les îles Canaries. Avec le début de ses études, elle n'avait pas encore l'argent nécessaire pour payer une telle chose. Elle avait donc réalisé cette vidéo afin de l’offrir à ses parents pour leur anniversaire de mariage. Sa mère l’embrassa sur le front et son père suivit. Étant fille unique, elle avait toujours été mise en parents, adulée, choyée. Il ne fallait pas croire qu’elle avait été une enfant pourrie gâtée loin de là. Les  Walker s’étaient fixé un juste milieu dans l’éducation de leur fille. Sixtine n’avait jamais souffert d’être enfant unique. Elle s’y était acclimatée, disant même qu’elle était spéciale, car la plupart de ses camarades de classe avaient au moins un frère ou une sœur.Elle grandit donc à Paradise, là où elle était née. Durant son adolescence, elle ne causa que quelques petits soucis à ses parents. Des soucis comme  la plupart des adolescents connaissent. Il lui est arrivé de ramener un ou deux garçons en douce dans sa chambre sans que ses parents ne s’en aperçoivent. Et encore à l’heure d’aujourd’hui, ils ne sont pas au courant. « Vous êtes les meilleurs parents au monde. J’ai de la chance d’être votre fille. » Ses parents se regardèrent une fraction de seconde avant de prendre une nouvelle fois leur fille dans leurs bras.  

« A peine l'année commencée que je suis déjà fatiguée... » Sixtine se laissa tomber sur son lit tout en fermant les yeux. Sa meilleure amie, Jane, rigola tout en s'installant à côté d'elle. Sixtine venait de commencer les cours il y a trois mois. La photographie ayant toujours été sa grande passion, elle n’avait eu aucun mal à choisir son orientation. L’horaire des cours de ce premier semestre était complet, elle n’avait que peu de temps libre. Et quand elle en avait, elle devait bosser sur des projets, des devoirs. Sa meilleure amie ne la voyait plus aussi souvent qu’avant. A son grand regret. Néanmoins, lors des retrouvailles, elles s’arrangeaient toujours pour réaliser une sortie, s’amuser. « Hum…Et si on sortait ce soir ? » Sixtine se releva doucement. Sortir ? Pourquoi pas. Après tout, elle n’avait pas cours demain et elle était légèrement en avance dans ses travaux. Elle pouvait bien s’autoriser un petit moment de détente tout de même. C’est ainsi que Jane et Sixtine se retrouvèrent en boite de nuit. L’idée de départ de Sixtine était simple : ne pas boire, seulement profiter de la soirée en étant sobre. Cependant, avec une meilleure amie comme Jane, on ne pouvait tenir ce genre d’idée. Au bout de trois verres, n’étant pas encore totalement saoule, Sixtine se sépara de Jane –accaparée par un mec- pour se rendre sur la piste de danse. Elle se mit à danser comme une folle. Elle fut rejointe par un homme, sans doute plus âgé qu’elle. Elle s’en foutait pas mal sur le moment à vrai dire. La jeune femme dansa avec lui, langoureusement comme si elle avait ça toute sa vie. Ils finirent par s’embrasser et là, quelque chose se mit en marche. Quelque chose contre laquelle Sixtine ne put rien faire.

Elle faisait les cent pas dans le salon. Comment en était-elle arrivée là ? Comment était-ce possible ? Jamais elle n’aurait pu imaginer que la malédiction s’attaquerait à elle et pourtant … Elle ne rêvait pas. A son doigt, se trouvait bel et bien une alliance en or blanc. Elle ne s’appelait plus Sixtine Walker mais Sixtine Abraham-Walker. Elle s’était mariée à un inconnu rencontré dans une boite de nuit. Merveilleux, splendide. Et ses parents dans tout cela ? La nouvelle les avait complètement surpris. « Mariée ? Tu as à peine vingt ans Sixtine. Mon dieu, mon dieu… Ses parents lui avaient demandé des explications, mais elle n’avait su quoi répondre. Elle ne savait même pas comment elle avait pu accepter de se marier à un inconnu. Fichue malédiction ! Ses parents ne posèrent pas plus de questions à leur fille. De toute manière, celle-ci ne semblait pas très encline à parler. « Bien. Dans ce cas, il faudra que tu nous présentes ton mari. Et, hum … tu comptes vivre avec lui j’imagine. » Ce fut une douche froide pour Sixtine. Vivre avec lui…Mon dieu.

Deux ans plus tard, Sixtine en est toujours au même point : mariée à un homme contre sa volonté. Tout ce dont elle aspire pour le moment, c’est rencontrer la personne qui la libérera de cette malédiction. Elle espère, chaque soir dans son lit, elle croise les doigts pour le rencontrer.