Je n’aurai jamais imaginé être dans une telle situation. Et pourtant, c’était arrivé. Au mauvais moment, au mauvais endroit, aux mauvaises personnes. Et dire que le destin, la vie d’une personne si chère pouvait s’éteindre aussi rapidement qu’une flemme d’une bougie. Elle est là, présente devant vos yeux, et l’instant d’après elle est partie. Partie pour un meilleur monde, je l’espère, rejoignant le ciel, telle une colombe. Et c’est souvent à cet instant que l’on comprend que cette personne vous a tant apporté. Vous ne le lui aviez jamais dit, exprimer toute cette gratitude, toute cette amour que vous lui portiez et c’est qu’au dernier moment que vous le réaliser…vous ne lui avez jamais dis « Je t’aime ».***
« Arrêtes Ryan ! Enlève-moi ça ! » « C’est qu’une araignée ! » « Justement, elle est immonde ! » Il rigolait, jubilait même de me voir aussi déstabiliser par une si petite chose. Pourtant, ça me répugnait. Autant, je n’étais pas apeuré quand je voyais un gros caïd, un truand, un tueur dans un tribunal, mais une araignée…c’était autre chose.
« Allez, lâche-là Ryan ! On va passer à table » fis-je Sarah, au loin. D’un regard, je remerciais ma meilleure amie. La relâchant par la fenêtre, je l’entendais encore rire.
« Elle n’allait pas te faire de mal… » Je daignais même pas lui répondre. Ce qu’il pouvait m’énerver celui-là ! Depuis qu’on s’était rencontré, par un rendez-vous arranger par Sarah, ça avait été une catastrophe nous deux. Entièrement différents, on ne s’entendait pas, pourtant nous avions les deux meilleurs amis en commun et nous nous devions de rester ensemble...à mon plus grand désespoir. Avant d’aller m’asseoir à table, je passais devant les deux berceaux de mes deux filleuls préférés.
« Oh, mais vous êtes tellement mignons vous deux ! Je vous croquerez presque » Tandis que j’appréciais mon petit moment gaga avec ces deux beaux enfants, je sentis Ryan se poser à coté de moi :
« Les gars…Qui est le meilleur parrain du monde ? Hein qui est le meilleur parrain ? » Je roulais des yeux.
« Tu veux bien arrêter ton cirque ? » « Quoi, tu veux même pas que j’aille voir mes deux filleuls préférés ? » Je soupirai et me dirigea vers Sarah et Mickael qui finissaient de préparer la table. Sarah me souffla dans l’oreille :
« Quand est-ce que vous allez vous entendre ? » Je la regardais vivement :
« Jamais ! » Son regard de mère mécontente me perça à jour.
« Non mais regarde-là… » Il était en train de faire l’imbécile devant les enfants, faisant des grimaces pour les faire rire
« C’est un gamin ! » « C’est un gentil parrain qui fait rire mes enfants » dit-elle en plaçant la dernière serviette.
« C’est ta vision des choses. » J’avais terminé cette conversation. On allait probablement jamais s’entendre, et c’était mieux comme ça. Je n’avais pas besoin d’un imbécile comme lui dans ma vie. Il se résumait à simplement être l’ami de mes meilleurs amis.
***
Je savais qu’un coup de fil pouvait changer toute une vie, et cette nuit je comprenais réellement le sens de ces mots. Lorsque le téléphone avait sonné en plein milieu de la nuit, je m’étais évidement pas douté de ce qui allait me tomber sur les épaules. Sous le choc, je m’étais habillé rapidement et j’avais couru au commissariat. J’attrapais un officier en lui expliquant la situation et il m’avait apporté voir une autre personne, chargée de l’affaire.
« Comment est-ce arrivé ? » demandais-je, les larmes aux yeux.
« Une voiture qui a dévié de sa route. Le conducteur était ivre » « Oh mon dieu… » Fis-je, complètement désarmé. La boule au ventre, j’essayais d’encaisser le coup. L’officier repris, comme pour me rassurer :
« Ils n’ont pas souffert, ils sont morts sur le coup » J’échappais un sanglot que je tentais de ravaler.
« Et…et les jumeaux ? Et aussi était dans la voiture ? » « Non, ils étaient chez une amie » Un sentiment de soulagement s’empara de moi. Même si je venais de perdre deux meilleurs amis, il me restait mes filleuls.
« Ils sont où là ? » L’officier consulta un dossier et m’informa :
« Ils sont dans les mains d’une assistante sociale » « Et qu’est ce qui est prévu pour eux ? » « Le testament le déterminera… » Je remerciais le policier comme je pu, avant de sortir d’un pas un peu fébrile. J’aperçu au loin Ryan qui se précipitait pour lui aussi avoir des nouvelles. Lorsqu’il me vit, il comprit que c’était trop tard. D’instinct, je me blottis dans ses bras pour évacuer toutes les larmes qui s’échappaient de mes yeux déjà bien rouges.
***
Face à l’avocat désigné par Sarah et Mickael, nous étions comme deux enfants face à instituteur. Ryan se demandait pourquoi nous étions tous les deux convoqués et à vrai dire, je me le demandais aussi. D’habitude, après un décès, le notaire demandait au successeur de venir. Etions-nous tous les deux successeurs de quelque chose ? L’idée m’effraya un instant, même si je reconnaissais bien Sarah là.
« Je vous ai demandé de venir aujourd’hui pour faire suite aux demandes de Sarah et Mickael, s’ils leur arrivaient quelque chose » Nous écoutions sagement, impatient de savoir la suite. Je jetais un coup d’œil rapide à Ryan, il jouait nerveusement avec ses mains – chose qu’il faisait quotidiennement lorsqu’il était stressé.
« Ils n’avaient pas beaucoup d’économie et leur fortune se résumait simplement à la grande maison familiale. Cependant, dans leur testament, ils ont stipulé que les deux seuls personnes qui seraient digne de leur trésor – c'est-à-dire leurs enfants, Noah et Joaquim – étaient vous » Je déglutis.
« Attendez…comment ça nous ? Il n’a jamais eu de nous. » « Et bien pour Sarah et Mickael, ce n’était pas le cas. Ils vous ont désigné comme tuteurs légaux des enfants. » Ryan prit aussitôt la parole :
« C’est pas possible, on n’est pas apte à les prendre en charge…tous les deux » Il hésita sur les derniers mots, comme si cette supposition était un refus catégorique.
« Il n’y a personne d’autre ? Papi Jacques ? » Je le coupa aussitôt :
« Il est en maison de retraite…Mais les cousins Jenkins, ils savent s’occuper d’enfants eux ! » Le notaire secoua la tête comme signe de négation :
« J’ai bien peur qu’une issue de ce type n’est pas possible. Ils exigeaient vraiment vous voir s’occuper des jumeaux, et me l’ont bien fait comprendre. » Je restais estomaqué, comment ils avaient pu nous faire ça ? J’adorais mes filleuls, mais je n’étais pas prête à avoir une famille, des enfants à ma charge. Je passais le plus clair de mon temps au travail, comment j’allais faire pour m’occuper pas d’un enfant, mais de deux ? Ryan semblait tout aussi bouleversé. Lui qui adorait sa liberté d’homme et qui en était fier, il allait devoir faire une croix dessus.
« Ce n’est pas tout… » Nous le regardâmes vivement. Qu’est ce qu’il allait nous demander encore.
« Sarah et Mickael ont précisé qu’ils vous léguaient leur maison…à tous les deux, pour y élever les jumeaux. » « Vous voulez dire…que nous devions cohabiter ? » « C’est exact. Bien évidemment, vous allez avoir des périodes d’essais, qu’une assistante sociale suivra de prêt, et si le contrat n’est pas rempli de votre côté, je serai contraint de les laisser à un orphelinat, le temps qu’on leur trouve une maison d’accueil ». Les laisser à des inconnus ? Jamais de la vie ! C’était hors de question.
« D’accord, j’accepte. » Ryan me regarda, l’air interloqué. « Vous voulez bien nous excusez un instant ? Ollie, je dois te parler en privé. » D’un pas déterminé, je le suivis dans le couloir, mais mon choix était fait. Et s’il n’acceptait pas, je prendrai l’entière responsabilité des jumeaux…même si ça m’effrayait totalement.
« T’es devenue folle ? On ne peut pas accepter ! » Je lui balança un doigt accusateur sous le nez
« Ce sont de Noah et Joaquim dont on parle ! Tes filleuls préférés, tu te souviens ! Une maison d’accueil ? T’es sérieux ? On ne peut pas leur faire ça…Pas à Sarah et à Mickael ! Essayer, c’est tout ce que je te demande ! » Il réfléchit un instant et répondu :
« Pour Sarah et Mickael ? » « Oui, pour eux. » « J’en suis » fit-il a ma grande surprise. Il semblait effrayé, et on était deux. On ne se supportait pas, élever ensemble des enfants c’était mission impossible, et pourtant, il fallait bien qu’on réussisse ce challenge infaisable.